Le culte juif
25 septembre, 2023Attente messianique juive
2 octobre, 2023Les fêtes et célébrations juives
Note de l’éditeur : Ceci est le quatrième chapitre de la série La vie des Juifs au temps de Jésus.
La loi de Moïse décrit les principales fêtes et célébrations juives en trois endroits : Exode 23, Lévitique 23 et Deutéronome 16. Exode 23 et Deutéronome 16 se concentrent sur les trois « fêtes de pèlerinage », que sont la Pâque (ou fête des pains sans levain), la Pentecôte (ou fête des semaines) et la fête des tabernacles. La loi exigeait que tous les hommes d’Israël participent chaque année à ces fêtes dans le sanctuaire central qui fut désigné (Dt 16.16). Lévitique 23 donne une liste plus complète des fêtes, comprenant la fête des prémices, la fête des trompettes, et le jour des expiations. Cependant, il n’y a guère de description de la manière dont les anciens Israélites célébraient les fêtes. Le mode de célébration a sans doute changé au fil du temps, tout comme nous avons constaté des changements dans le culte chrétien communautaire au cours des deux dernières générations.
Outre les fêtes décrites dans le Pentateuque, deux autres fêtes sont apparues dans l’histoire tardive d’Israël. La première était celle de Purim, qui célébrait le salut des Juifs à l’époque d’Esther. La seconde était celle d’Hanoukka. Les Juifs ont commencé à observer Hanoukka à partir de la nouvelle dédicace du temple, après les déprédations d’Antiochus IV Épiphane. L’histoire est racontée dans les livres apocryphes 1 Maccabées (4.52-58) et 2 Maccabées (10.6-8).
Les écrits intertestamentaires nous donnent que peu d’informations sur la façon dont l’observation des fêtes a changé. La littérature rabbinique plus tardive nous donne plus de détails. Toutefois, on ne sait pas exactement dans quelle mesure les documents rabbiniques décrivent la période gréco-romaine.
Conformément aux instructions du Pentateuque, la Pâque est restée une fête de pèlerinage jusqu’à l’époque du Nouveau Testament (Luc 2.41-50). Souvent, c’est toute la famille qui participait à la fête, pas seulement les hommes. Les agneaux de la Pâque étaient sacrifiés au temple, puis emportés par les familles pour être rôtis et mangés. Selon la description biblique, la Pâque est la soirée qui précède le début de la fête des pains sans levain. Exode 12 ordonne au peuple de manger l’agneau rôti avec des herbes amères et des pains sans levain. Étant donné que la pratique, à l’époque du Nouveau Testament, était d’observer la Pâque à Jérusalem, ceux qui ne pouvaient pas faire le pèlerinage avaient tendance à se concentrer sur la fête des pains sans levain. Le fait d’ôter le levain de la maison était un élément essentiel de cette fête. Aujourd’hui encore, les Juifs pratiquants ôtent soigneusement tout le levain de leur maison.
La Pentecôte (qui signifie « cinquantième ») a lieu cinquante jours après le tournoiement de la gerbe d’orge (Lé 23.9-21). Elle était aussi appelée fête de la moisson (Ex 23.16), ou des semaines (Dt 16.10). À la Pentecôte, les Juifs lisaient le livre de Ruth durant la fête, puisque la Pentecôte a lieu pendant les moissons de l’orge et du blé (Ruth 1.22). Comme la plupart des autres fêtes, à l’exception du jour des expiations, la fête était un moment de réjouissance. Cependant, il y a peu d’informations sur la manière précise dont elle était célébrée. Toujours un dimanche dans la tradition chrétienne, le jour de la semaine varie dans la pratique juive. Il n’a jamais lieu le mardi, le jeudi ou le samedi. Pendant la période intertestamentaire, les Juifs établirent un lien entre la Pentecôte et le don de la loi par Dieu au Sinaï (peut-être en se basant sur la date donnée en Exode 19.1). Comme la Pâque, la Pentecôte était une fête de pèlerinage dans le Nouveau Testament ; Actes 2 le montre clairement (voir aussi Actes 20.6, 16).
La fête des trompettes, connue aujourd’hui sous le nom de Rosh Hashanah (qui signifie « nouvelle année »), était célébrée, comme aujourd’hui, au cours du mois juif de Tishri. Cette période correspond, dans nos calendriers modernes, à la période allant de début septembre à début octobre. Le son de la corne de bélier ainsi qu’un repas festif constituent les éléments essentiels de la fête. Cette pratique est probablement très ancienne, et était presque certainement en vigueur à l’époque gréco-romaine.
Le jour des expiations était un jour de jeûne et de repentance. Selon le philosophe juif Philon, il était soigneusement observé non seulement par « ceux qui sont zélés en matière de piété et de sainteté, mais même par ceux qui ne font rien de religieux le reste du temps. » Selon le livre intertestamentaire des Jubilés, le jour des expiations trouve son origine dans les péchés des frères de Joseph à son encontre, et dans le chagrin qu’ils ont causé à leur père, Jacob. En Actes 27.9, le jour des expiations est appelé « le jeûne ».
La fête des tabernacles était la suivante dans l’ordre chronologique, cinq jours après le jour des expiations. C’était aussi la dernière des fêtes annuelles prescrites par la loi. Jubilés 16.21-30 identifie Abraham comme étant le premier à avoir célébré la fête des tabernacles. Cette référence reflète la tradition juive selon laquelle Abraham était fidèle à la loi postérieure de Moïse. De toutes les fêtes mentionnées dans le Pentateuque, celle-ci était peut-être celle qui avait subi le plus d’ajouts à l’époque gréco-romaine. La littérature rabbinique, par exemple, montre qu’il y avait de nombreuses discussions sur les matériaux que les Juifs pouvaient utiliser pour construire les abris temporaires appelés « cabanes » ou « tabernacles ». La littérature rabbinique décrit également les cérémonies de l’eau liées à la fête. L’origine de ces cérémonies est incertaine. Certains les font remonter à Ésaïe 12.3 : « Vous puiserez de l’eau avec joie aux sources du salut ». Ou alors, ces cérémonies peuvent faire allusion à l’approvisionnement en eau dans le désert (Ex 17 ; Nb 20). Quelle que soit leur origine, Jésus en a fait usage dans son invitation à la foule le dernier jour de la fête (Jean 7).
Les fêtes d’Hanoukka et de Purim remontent toutes deux à la période postexilique. Hanoukka est la première dans l’ordre, suivant de peu celle des tabernacles. L’historien juif Josèphe la désigne comme la fête des lumières, tandis que Jean 10.22 l’appelle la fête de la dédicace. Les traditions varient quant à l’origine précise du lien entre la fête et la lumière. La plus populaire est sans doute celle d’un miracle, qui aurait permis à une petite quantité d’huile de fournir suffisamment de combustible pour alimenter les lampes du temple pendant huit jours. La fête commence le 25 Kislev, soit fin novembre ou début décembre selon notre calendrier, ce qui la rapproche de Noël. C’était une période de joie et de célébration.
La fête de Purim célèbre la délivrance des Juifs à l’époque d’Esther. Le livre d’Esther lui-même ne prescrit aucune exigence religieuse pour cette fête. La tradition a toutefois instauré la lecture du livre d’Esther à la synagogue. Les gens célèbrent la fête en se donnant de la nourriture en cadeau, et en donnant l’aumône pour la charité (Est 9.22).
Ces fêtes semblent assez inoffensives en elles-mêmes, puisqu’elles sont axées sur la réjouissance et le festin. Cependant, un élément politique est sous-jacent à la quasi-totalité d’entre elles. Pâque célèbre la délivrance des Juifs de l’oppression égyptienne. Pentecôte commémore le don de la loi à Moïse, créant ainsi l’entité politique connue sous le nom d’Israël. Les tabernacles étaient la première fête célébrée après l’exil (Esdras 3.4 ; Néh 8.14-18). Hanoukka célèbre la purification du temple après la fin du règne détesté d’Antiochus IV Épiphane sur les Juifs. Purim célèbre la délivrance des Juifs d’un massacre motivé par des considérations politiques et raciales. Au Ier siècle de notre ère, les Juifs étaient sous la domination romaine. De nombreux Juifs n’appréciaient pas la domination romaine, qu’ils considéraient comme une continuité de l’histoire de l’oppression, dont ils avaient souffert. Comme trois de ces fêtes encourageaient le pèlerinage à Jérusalem, ce qui rassemblait de grandes foules de Juifs zélés, il y avait toujours le risque d’un soulèvement. C’était la raison invoquée par les sacrificateurs initialement, pour ne pas vouloir poursuivre Jésus pendant la fête de la Pâque (Mt 26.5).
Les fêtes avaient un caractère politique mais aussi un élément d’attente messianique. Moïse et Élie étaient considérés comme des figures d’importance messianique. La célébration des fêtes faisait toujours penser à Moïse, ce qui stimulait l’espoir d’un prophète comme Moïse (Dt 18.15-22, 34.10). David, Lévi, et le Fils de l’homme de Daniel 7, alimentaient les spéculations messianiques. Les espoirs et les attentes de délivrance de la domination romaine ont coloré tous ces éléments messianiques de fortes connotations politiques. Bien que de nombreux Juifs n’aient pas reconnu Jésus comme le Messie prédit dans l’Ancien Testament, certains l’ont fait. Sinon, nous n’aurions pas de Nouveau Testament. Les autres, en revanche, continuaient d’espérer un renversement de la domination romaine. Les événements de 70 ap. J.-C., et la destruction de Jérusalem, ont d’abord anéanti ces espoirs. La défaite de la rébellion de Bar Kokhba, vers 135 après J.-C., a mis fin à ces espoirs. À partir de ce moment-là, l’observation des fêtes juives est devenue principalement, voire exclusivement, une observation religieuse, avec des connotations politiques minimes.