La reconnaissance dans la prière
24 juillet, 2020S’aimer soi-même
31 juillet, 2020Qui est mon prochain et pourquoi devrais-je l’aimer ?
Note de l’éditeur : Ceci est le premier chapitre de la série « Aimer son prochain», publiée par le Tabletalk Magazine.
J’aime l’accent mis par Luc sur l’Esprit Saint. Il nous dit que l’Esprit a couvert Marie de son ombre, et que le Logos éternel a pris chair (1.35). L’Esprit, sous la forme d’une colombe, est descendu sur Jésus lors de son baptême (3.22). Jésus a fait face à la tentation du désert alors qu’il était sous l’influence de l’Esprit (4.1). Citant Ésaïe, déclarant son onction par l’Esprit, notre Seigneur a commencé son ministère public (v. 18). Conçu, rendu puissant et oint par l’Esprit, Jésus se réjouit ensuite dans l’Esprit. Qu’est-ce qui a rempli le cœur de Christ d’une joie suscitée par l’Esprit ? L’ironie découlant du fait que l’humilité fait que les sages et les personnes intelligentes de ce monde passent à côté des vérités de l’évangile tandis que Jésus permet aux petits enfants de les connaître (10.21-22).
C’est le contexte d’une « mise à l’épreuve » qu’un professeur de la loi a conçu pour Jésus (v. 25-37). Tenter de coincer Jésus dans un coin ne fonctionne jamais bien, ni à l’époque ni maintenant. Et les histoires, une fois que nous supposons que nous les avons comprises, ont tendance à perdre leur mordant. Examinons à nouveau ce texte.
« Un professeur de la loi se leva et dit à Jésus pour le mettre à l’épreuve » (v. 25). C’est la façon dont Luc dit : « Regardez ça – un théologien de l’Ancien Testament très intelligent s’est levé devant tout le monde et a essayé de mettre Jésus au pied du mur. » Il a posé une question cruciale sur la vie éternelle – la question que la Bible aborde du début à la fin. Cependant, Luc veut que nous connaissions l’intention qui se cache derrière cette interrogation. Non seulement ce spécialiste de la Bible essayait de faire trébucher Jésus, mais il supposait qu’il pouvait se justifier lui-même (v. 29). « Que dois-je faire pour hériter de la vie éternelle ? » La question est mal conçue et arrogante, car elle suppose que l’héritage – par définition, un don – est quelque chose qui peut être gagné. Ce faux évangile nous traverse tous. Nous nous demandons tous ce que nous devons faire pour gagner la vie éternelle, pour mériter notre justification.
Non seulement mettre Jésus à l’épreuve ne fonctionne jamais bien, mais c’est strictement interdit (Dt 6.16). Jésus, imperturbable, renverse la situation avec une mise à l’épreuve de son cru. Il interroge ce professeur de la loi sur la loi. Pour ce professeur sûr de lui, cela ressemble à un exercice routinier. Il parle rapidement, avec assurance et concision : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ta pensée, et ton prochain comme toi-même. » (Luc 10.27) Jésus lui donne en fait un 20/20, disant en effet : « Voilà ta réponse. Tu l’as dit toi-même. Accomplis toute la loi, et tu auras la vie éternelle » (voir v. 28). Le professeur a raison à propos de la loi, car il a rassemblé les commandements concernant l’amour de Dieu et du prochain (Lv 19.18 ; Dt 6.4-5). Et Jésus, bien sûr, est juste – la vie éternelle dépend de l’achèvement de la loi.
Nous sommes les biens chéris de Celui qui est devenu notre prochain, prenant chair, habitant parmi nous.
Le professeur de la loi, très érudit, pour ne pas être devancé, conçoit une deuxième série de mises à l’épreuve pour s’assurer que Jésus sait que la réponse n’est pas si simple : « Et qui est mon prochain ? » (Luc 10.29) Notre Seigneur renverse à nouveau les rôles, mais d’abord, il raconte une histoire au professeur.
L’histoire que Jésus raconte ferait une excellente pièce de théâtre. Un voyageur qui ne se doute de rien fait un voyage dangereux, un voyage qui n’est pas pour les faibles de cœur. Vingt kilomètres en pente raide, descendant de Jérusalem à Jéricho, à une altitude de 1000 mètres. L’évêque J.C. Ryle a qualifié la route de Jéricho de « chemin sanglant ». Jésus sait que le professeur ressentira le danger. La seule chose que l’on peut ajouter est : « C’était une nuit sombre et orageuse… »
Le rideau est levé : des voleurs ! Sortis de nulle part ! Il y a des passages traîtres, lointains, parsemés de lieux clandestins d’où l’on peut tendre des embuscades à des personnes qui ne se doutent de rien et qui ne sont pas accompagnées. Notre voyageur fatigué est laissé nu, ensanglanté, brisé et à moitié mort (v. 30). Entre en scène à droite : un prêtre. Il le voit et passe de l’autre côté de la route. Même chose pour le lévite qui passe ensuite (v. 31-32). Et si c’était un cadavre ? Ils ne peuvent pas risquer de se souiller. Qui sait quelle gymnastique éthique ils emploient pour rationaliser, voire sanctifier leur manque de compassion. Lorsque nous voyons les nécessiteux, surtout lorsque cela implique un risque, lorsque plus que la commodité est en jeu, allons-nous tendre la main ou passer outre ? Charles Spurgeon, dont la chaire se trouvait au cœur d’une grande ville pleine de merveilles et de richesses, d’appauvrissement et de criminalité, a un jour exhorté la congrégation du Metropolitan Tabernacle de Londres de la sorte :
Vous avez souri à propos de ce que le prêtre aurait pu dire, mais si vous vous trouvez des excuses à chaque fois qu’un besoin réel se présente à vous, et que vous êtes capables de le soulager, vous n’avez pas besoin de sourire à propos de vos excuses, le diable le fera ; vous feriez mieux de pleurer à leur sujet, car c’est là la plus grave raison de vous lamenter sur le fait que votre cœur est dur envers vos semblables lorsqu’ils sont malades, et peut-être malades au point d’en mourir.
Une entrée surprenante, à gauche de la scène : un Samaritain. Le professeur sait qu’il n’y a rien de bon dans un Samaritain. Pourtant, le samaritain a de la splanchna. Ce n’est pas le mot grec le plus éloquent, car il roule sur les lèvres, mais il doit être l’un des plus beaux mots. Il signifie « compassion », et le Samaritain verse l’huile et le vin de la compassion sur les blessures de l’homme et les panse. Quelle scène tendre. Jésus dit que le Samaritain a de la compassion. Mais, dans un sens, la compassion a consumé le Samaritain. Il donne et donne en abondance. Rien ne manque aux soins de ce pauvre étranger à l’auberge (v. 33-35).
Maintenant, Jésus renvoie la question du professeur à lui-même. Au lieu de répondre : « Qui est mon prochain ? » Jésus, tirant de son récit poignant une argumentation irréfutable, demande au légiste : « Lequel de ces trois te semble avoir été le prochain de celui qui était tombé au milieu des brigands ? » (v. 36) L’arrogance du professeur est mise à mal. Il répond : « C’est celui qui a agi avec compassion envers lui. » (v. 37)
L’avocat a peut-être commencé à comprendre. Nous devons considérer à nouveau le message et la manière de la miséricorde de Jésus. Nous devons aller et faire de même. La plupart des gens se retrouvent à tour de rôle, meurtris et battus, sur la route de Jéricho, pour ainsi dire. Cette route peut être constituée de problèmes émotionnels, de détresse financière, de maladie, d’addiction ou de désaccord conjugal. La compassion triomphera-t-elle de la facilité ? La pitié triomphera-t-elle des préjugés ? La compréhension tendre triomphera-t-elle de la tyrannie de l’urgence ? Et si quelqu’un se retrouvait sur la route de Jéricho à cause d’une folie pécheresse ? Devrais-je prendre la peine d’aider quelqu’un comme ça ? Mais n’est-ce pas ainsi que la plupart d’entre nous se retrouvent sur leur propre route de Jéricho ?
Et si la personne dans le besoin était trop différente de moi ? Peut-être que quelqu’un de son côté de la route devrait s’engager. Mais la question n’est pas : « Comment quelqu’un dont la couleur de peau n’est pas comme la mienne, dont les croyances sont différentes, dont le passé, le présent ou le futur sexuel est embarrassant, peut-il être mon prochain ? » Nous devons plutôt nous demander : « Quel prochain devrais-je être aujourd’hui ? Quel prochain puis-je devenir ? » Si, comme le dit le Psaume 23.6, la grâce m’accompagne, alors rejoignons-la pleinement. Même si – et surtout si – cette manière de vivre est risquée, coûteuse. Même si – surtout si – nous ne sommes pas nous-mêmes très aisés. Après tout, l’épreuve de la vie chrétienne à laquelle se réfère Hébreux 12.1 est une agonie – elle peut être angoissante, pesante. Jonathan Edwards a prêché une prédication pénétrante, « Le devoir de charité envers les pauvres », dans laquelle il demandait :
Si nous ne sommes jamais obligés d’alléger le fardeau des autres, mais seulement lorsque nous pouvons le faire sans nous surcharger nous-mêmes, alors comment pouvons-nous supporter le fardeau de notre prochain, lorsque nous ne portons aucun fardeau ? Même si nous ne possédons rien de superflu, il se peut que nous soyons obligés de donner pour le soulagement d’autres personnes qui sont dans une nécessité beaucoup plus grande, comme le montre cette règle ; Luc 3.11 : « Que celui qui a deux chemises partage avec celui qui n’en a pas, et que celui qui a de quoi manger fasse de même. »
En donnant notre chemise, en couvrant une personne nue et qui a froid, nous nous revêtons d’un cœur compatissant (Col 3.12). Ne nous détournons pas comme le jeune homme riche de Marc 10.17-22, qui voulait gagner la vie éternelle et qui était découragé parce que ses grands biens le possédaient.
Nous sommes les biens chéris de Celui qui est devenu notre prochain, prenant chair, habitant parmi nous, courant la course pour nous, accomplissant toute la loi, chargé de notre péché, abandonné, ensanglanté, battu et mort sur la croix. Il nous a soulevés de la route de Jéricho de notre propre péché et de notre désolation, a versé l’huile et le vin du salut sur nous, nous a couverts d’une nouvelle « chemise » – la robe de sa justice (Ésaïe 61.10) – a pansé nos blessures par ses blessures (53.5), et nous a assuré une place dans l’auberge du sanctuaire intérieur, au-delà du voile (Hé 6.19). Il nous demande maintenant d’être des prochains pleins d’amour.
Plutôt que de demander ce que nous devons faire pour gagner la vie éternelle, nous devenons les prochains des nécessiteux, non pas pour gagner la vie éternelle, mais pour prouver que nous avons la vie éternelle ; non pas pour mériter notre justification, mais pour manifester que nous sommes justifiés par une grâce qui est toujours à l’affût, surtout lorsque nous errons sur les chemins les plus reculés et les plus périlleux.